Le héros du roman de Marcel Rouff est un homme qui voue son existence aux plaisir de la table.
Qui est véritablement ce Dodin-Bouffant ? A quoi ressemble-t-il ?
A-t-il existé ou n’est-ce que le fruit de l’imagination de Marcel Rouff
De qui ce dernier s’est-il inspiré pour créer le personnage de son roman La vie et la Passion de Dodin-Bouffant, gourmet ?
Dodin-Bouffant est un vieux magistrat en retraite. “Compatriote de l’illustre auteur de la Physiologie du goût et qui, au fond de sa province jurassienne, a consacré sa vie et son amour à une des traditions les plus vieilles et des plus essentielles de sa Patrie ? Dodin-Bouffant est gourmet comme Claude Lorrain est peintre, comme Berlioz est musicien. » poursuit-il. » précise Marcel Rouff.
Dodin-Bouffant est l’archétype du gastronome. “Il personnifie avec une rare puissance cette passion qu’il sait rendre intellectuelle : la gastronomie. Il la cultive, il la perfectionne, il lui sacrifie tout le reste, il la magnifie, il l’idéalise, il l’élève, enfin, jusqu’à la hauteur d’un Grand Art. De Dodin-Bouffant se dégage une sympathie humaine et profonde. On l’aime tout de suite comme un vieil ami, on s’attache à lui, on partage ses joies et ses peines et on finit par le respecter comme un héros ou un saint. Il fallait pour réaliser un tel “bonhomme” tout le talent souple, varié et nuancé de Marcel Rouff. Il y fallait aussi sa parfaite connaissance du sujet, son immense érudition gastronomique, ses dons d’observation, de tendresse, d’ironie, d’humanité. Il y fallait surtout cette éminente qualité, la plus rare de toutes : le sens de la vie.” écrit Curnonsky dans le numéro du 24 mai 1924 du journal Comœdia.
Dodin-Bouffant – dont on ignore le prénom – n’accepte que ses amis proches à sa table : Magot, le marchand de bestiaux, Beaubois le notaire, Rabaz le docteur. Et ce sont les femmes – Eugénie et Adèle – qui officient et possèdent seules l’art de bien cuisiner. Dodin-Bouffant maîtrisant lui l’art de la dégustation sans jamais prendre en main une casserole. La séparation entre cuisinier et mangeur est, pour lui, nette et infranchissable.
Dodin-Bouffant “est de taille moyenne ; il est puissamment taillé ; il est gras avec dignité et élégance. Il est presque blanc de cheveux. Il a la lèvre rasée. Il porte des favoris. Il parle sans hâte, ferme les yeux pour se recueillir, émet sans pédanterie des aphorismes, aime la malice, ne redoute point les gaillardises. Il se plaît, au dessert, à raconter à des amis bien choisis les souvenirs de sa jeunesse, et c’est l’unique raison qui lui fait préférer le bourgogne au bordeaux. Il vit aimablement avec son bien familial. C’est un sage et c’est un vieux Français.” précise encore Marcel Rouff dans sa préface.
Dodin-Bouffant a-t-il existé ?
Personnage imaginaire, Dodin-Bouffant fait rapidement penser à plusieurs gastronomes célèbres. On évoque notamment Brillat-Savarin, l’auteur de La Physiologie du goût, magistrat également ; Camille Cerf, le fondateur de l’Académie du goût et Lucien Tendret, l’auteur de La Cuisine au pays de Brillat-Savarin. Dans les Cours gastronomiques, ou, Les dîners de Manant-ville, Charles-Louis Cadet de Gassicourt (1769-1821) évoque, lui, un abbé Dodin, dont le père est coutelier à Langres, et que Grimod de La Reynière avait admis dans ses dîners.
Plus étonnant encore, dans La France Gastronomique, Curnonsky écrit en 1922, « l’an dernier, nous fîmes, Marcel Rouff et moi, avec notre ami Dodin-Bouffant, un premier voyage d’études préliminaires en Aunis et Saintonge… » on en vient donc à imaginer que Dodin-Bouffant a vraiment existé…